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La Gardienne oubliée

Par delà les vallées, par delà les rivières, dominant les marais, dominant les forêts, oubliée, remplacée, la Pierre grise toise nos usines, nos immeubles, nos églises, nos cheminées rougeoyantes nocturnes.

Je n’étais pas né qu’elle se dréssait déjà fiérement devant les Hommes.

La cité Océane ne rayonnait pas qu’elle observait en silence la vallée et puis la mer.
Elle fut posée là par quelques sages anciens détenteurs d’un savoir qui ne nous est pas parvenu à travers les écrits.

On l’a adoré, on l’a oublié, on l’a detesté, on l’a manipulé, on l’a retrouvée.

Qui sont ces Hommes qui l’ont installée ici?

Pourquoi cette pierre ?

En -2500 avt JC, les Hommes du Néolithique on trouvé cette pierre.

Pourquoi elle ? Peut être leur plaisait elle. Quoi qu’il en soit, ils ont su voir en elle quelque chose. Ils ont estimés qu’elle serait la pièce maîtresse de leur ouvrage.

En ce temps, les Hommes de toute l’Europe étaient pris d’une frénésie de construction.
Les pierres brutes étaient dressées partout en Europe, et même au delà des frontières que nous lui accordons aujourd’hui.

Il y a un premier enseignement à travers leur héritage plusieurs fois millénaire : La Beauté de la Nature.

Pourquoi tailler la pierre ? N’est elle pas essentiellement belle dans sa forme la plus brut ?
Si nous partons du principe que leur édifice se devait d’être beau, ou tout du moins plaisant à leur yeux, alors pourquoi ne pas avoir tailler cette pierre ? Ces Hommes devaient l’accepter dans sa forme la plus pure.
Le symbole qu’elle véhiculait était, à n’en pas douter, l’essence même de leur motivation alors qu’ils construisaient leur Dolmen.

Un Dolmen ?

Un veritable monument constitué de dalles massives abritant diverses salles funéraires. Le Dolmen était caché sous un monticule de pierres sèches et de terre que l’on appelle Tumulus.


Aujourd’hui, du dolmen, il ne reste que notre Pierre Grise.

Notre dolmen était un haut lieu de spiritualité.
Les Druides d’antan y pratiquaient leurs rites ancestraux.
Peut être y observaient ils les étoiles, en quête du Divin. Peut être y célébraient ils des mariages.
Peut être y honoraient ils leurs morts.
Peut être y transmettaient ils leur savoir.

Puis, à l’arrivée des Romains elle deviendra un repère pour tracer leur route.

La route tombera en désuétude, deviendra chemin, puis sentier, puis rien.
Mais la Pierre demeura.

Il se disait au XIXème siècle qu’une vielle dame, héritière des Druides d’autre fois, y lisait l’avenir. Au moyen âge, les abbesses, et autres curés des environs prêchaient qu’elle était le lieu maléfique par excellence, l’antre du Diable.
L’abbesse de Montivilliers la fit même gardée la nuit.

On raconte qu’un écuyer y avait vendu son âme au diable pour assouvir sa passion dévorante auprès de l’épouse de son noble maître.
La légende dit que le Diable aurait piégé l’écuyer dans le soubassement qui existait en ce temps la sous la pierre.
Au cours de ce siècle, on y entrepris des fouilles pour y trouver “le trésor de la pierre grise”.
Le butin fut bien maigre : une pièce de monnaie et des os humains.
En 1865 on la dessine pour la première fois. Je n’ai malheureusement pas trouvé cette esquisse première.

Il faudra attendre 1990 pour que l’archéologue Jean-Pierre Watté y entreprenne des fouilles.
Il prouvera que la pierre était bien un élément d’un Dolmen dit “simple”. Il trouvera des outils, des silex taillés, des tessons de poteries.

La Pierre Grise est décidément un lieu qui a toujours attiré.

Et aujourd’hui?

Aujourd’hui, l’on y laisse des offrandes.
L’on y célèbre les solstices, les équinoxes.

Aujourd’hui, la pierre fascine, attire, protège…

Aujourd’hui l’on continue d’y transmettre le savoir des Druides anciens, mais toujours par la parole, et jamais par l’écrit.

La Pierre Grise est notre gardienne depuis que l’Homme est Homme.

La Pierre Grise est le dernier vestige de cette civilisation vivant en symbiose avec la Nature. Cette époque où l’Homme était encore un animal vivant parmi les animaux.

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