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Du Val D’Epremesnil, une famille, une terre . . .

L’arbre généalogique de la famille Du Val D’Epremesnil

(source photo : Geneanet)


Une double propriété



A gauche le manoir, à droite le chateau
(source : CPA)

Il est bien important de distinguer deux propriétés. Le château d’Epremesnil à l’extrême ouest du plateau des Ardennes, et le manoir des Ardennes à l’extrême pointe est du plateau des Ardennes.


Une terre, une famille


L’arbre généalogique de la famille Du Val D’Epremesnil

(source photo : Geneanet)

En 1645, Alain du Val de Coupeauville obtient le baillage des terres d’Epremesnil. Son fils, fit fortune au Havre puis devint directeur d’une des premières compagnies de commerce encouragées par Colbert, la compagnie du Sénégal. Il obtint en 1719, la qualité de seigneur d’Epremesnil « pour service rendu en sa charge de président au grenier à sel et premier échevin du Havre ». Néanmoins, cela ne lui conférait pas pour autant la noblesse. L’aîné de la famille d’Epremesnil devint armateur, puis administrateur de la Compagnie des Indes à Lorient et voyagea à travers le monde. En 1755 il est commandant général des établissements français des Indes orientales et gouverneur de Madras.

Il aura un fils; Jean-Jacques, en 1745.


Des affaires d’une famille noble


Jean-Jacques Duval d’Epremesnil est avocat au Châtelet de Paris de 1751 à 1830. Les anglais ayant pris Pondichéry en Inde, les affaires des d’Epremesnil furent directement impactées. Aussi l’oncle de Jean-Jacques Duval d’Epremesnil accusa le comte Lally Tollendal, dernier gouverneur des Indes, d’avoir abusé de sa fonction et livré contre argent Pondichéry aux Anglais. À l’issue de ce procès mémorable plaidé en 1766 au Parlement de Paris, le comte avait été convaincu de haute trahison et décapité au sabre ! ! ! Soutenu par Voltaire, le fils du général Lally-Tollendal avait saisi le Parlement de Normandie pour examiner à nouveau cette cause mais Jean-Jacques d’Epremesnil, agissant en mémoire de son oncle l’accusateur, s’interposa, chercha et obtint la non-recevabilité qui fut confirmée par le Conseil d’État qui dénia au jeune Lally, né hors mariage, sa qualité de fils légitime de Lally-Tollendal. La reine ayant pris position en faveur du fils Lally-Tollendal, le dossier avait été largement commenté, et d’Epremesnil, en tenant tête aux souhaits de Marie-Antoinette, avait commencé à faire parler de lui. Devenu entre temps avocat au Parlement de Paris, il avait été exilé en 1771.


De l'Art Royal


Membre de la loge maçonnique des Neuf Sœurs fortement contestée par Louis XVI qui souhaite la dissoudre, Jean–Jacques Du Val D’Epremesnil tombe amoureux de l’épouse d’un “frère” et ami, Jacques Thilorier, avec laquelle il aura une liaison cachée. Bien plus tard, il développera une franc-maçonnerie égyptienne.


Je te magnétise. . .


« Dans ce temps-là, rapporte un contemporain, tout était magnétisme : la reine magnétisait le comte d’Artois, M. Necker magnétisait les finances, Louis XVI magnétisait le vin de Bourgogne et Mesmer magnétisait les jolies femmes et l’argent des sots ». Mais c’est quoi le magnétisme ? C’est une pratique thérapeutique. L’utilisation d’un fluide aux effets bénéfiques pour les personnes souffrant de troubles somatiques ou nerveux. Attention, à l’époque cela tenait plus du spectacle que de la science… Jean-Jacques Duval d’Epremesnil contribua à faire connaître cette pratique. Derrière cette pratique pseudo-médicale se cache en réalité un veritable commerce, d’énormes bénéfices. D’Epremesnil avec ses amis l’avocat Nicolas Bergasse et le vicomte de Puységur furent parmi les premiers élèves de Mesmer (le fondateur de la pratique). Ils purent enseigner à leur tour et soigner leur entourage. D’Epremesnil, qui avait magnétisé Mme Thilorier, se fit le défenseur des théories de Mesmer lorsqu’elles commencèrent à être attaquées par l’Académie de médecine. On lui reprochait d’être un charlatan et on ne prenait pas au sérieux ces séances individuelles ou de groupe au cours desquelles les mondains des deux sexes se touchaient mutuellement autour d’un baquet. Mesmer fut bientôt exilé, emportant, dit-on, avec lui, une somme avoisinant 500 000 livres…


Le nerf de la guerre


À Paris à cette époque, tout comme aujourd’hui, la spéculation immobilière est en plein essor. Certains terrains proches des grands boulevards étaient très recherchés. D’Epremesnil se lança dans un projet concernant l’hôpital des Quinze-Vingts que les promoteurs avaient prévu de déplacer et de reconstruire dans un nouveau quartier pour bénéficier d’énormes plus-values. En bref, D’Epremesnil s’enrichit.


Le monde en revolution


Duval d’Epremesnil éprouvait le besoin irrépressible de se mettre en avant et de marquer son opposition à l’autorité monarchique.

En ce sens, il est passé pour « révolutionnaire ». Mais son opposition devait se révéler corporatiste, celle de grands propriétaires terriens qui ne supportaient plus d’être soumis à la fiscalité commune quand la vieille noblesse y échappait. C’est cette « injustice » qui semble avoir été, en 1788, la raison de son opposition révolutionnaire à Versailles. Dès le début de la Révolution, d’Epremesnil résista secrètement au nouvel ordre, souhaitant le retour à la monarchie. Avant la prise de la Bastille, il s’entendit avec un certain nombre de députés de son bord et d’autres aristocrates pour échafauder des plans d’évasion de la famille royale. On connaît l’épisode de la fuite de Louis XVI et son arrestation à Varennes, mais une demi-douzaine de plans plus ou moins chimériques le précédèrent et le suivirent. Le 17 juillet 1792, Jean-Jacques Duval d’Epremesnil traversait la terrasse des Tuileries lorsqu’il fut reconnu et désigné aux Fédérés marseillais. Il fut saisi au collet et frappé, puis entraîné de force au Palais-Royal pour y être pendu. Arrivé sur place, La foule était très remontée contre d’Epremesnil qui, déjà couvert de sang et de boue, fut arraché tant bien que mal au lynchage en cours, et dirigé vers la Trésorerie nationale, dans un état grave. Prévenu entre temps, le maire Pétion s’adressa à la foule en délire qui, face à l’entrée de la Trésorerie, n’avait pas renoncé à sa proie. Il annonça que d’Epremesnil serait jugé au Tribunal criminel qui le condamnerait certainement comme traître à sa patrie. On le relâcha en Août.

Après l’exécution de Louis XVI, les royalistes recomposent leurs réseaux autour de sa personne. Très en vue, d’Epremesnil est arrêté entre le 6 et le 8 avril 1793 avec une de ses complices. Toutes les entreprises initiées par la vieille noblesse pour laquelle, non sans courage, d’Epremesnil se mettait en avant, allaient être tragiquement vouées à l’échec. Le 2 juin 1793, d’Epremesnil passa l’été avec les siens dans son château d’Epremesnil mais, après la prise de Toulon, le bruit courut dans la région qu’il intriguait pour faire livrer aux Anglais le port du Havre. Cette dénonciation reçue à la municipalité du Havre, qui n’est étayée par aucun document, a été à l’origine de ses malheurs.


Arrêté et exécuté


Le 7 septembre 1793, recherché, D’Epremesnil dut se cacher. Selon la légende, il se serait dissimulé plusieurs jours dans un souterrain inconnu à Rouelles, non loin du château d’Epremesnil. Il fut trouvé et arrêté, placé contre argent en surveillance chez lui, puis, des propositions d’évasion lui ayant été faites, il fut envoyé par précaution à la maison d’arrêt du Havre. Ramené à Paris le 10 pluviôse de l’an II et incarcéré au Luxembourg, il obtint son transfert à la prison des Anglaises où son épouse, qui l’avait suivi libre depuis Le Havre, était détenue depuis qu’elle avait été arrêtée à son tour. Jugé, il fut condamné à mort et guillotiné le 22 avril 1794. Mme d’Epremesnil ne lui survécut que deux mois à peine. Il laissa un fils — Jacques Duval de Maréfosse — de son premier mariage, et trois jeunes enfants de sa veuve. Les papiers personnels de Jean-Jacques Duval d’Epremesnil et de la famille d’Epremesnil sont conservés aux Archives nationales sous la cote 158AP32.


Et après?


Carte présentant le domaine
(source : Geoportail, IGN)

Le Chateau en 1946
(source : Geoportail, IGN)


Le manoir aussi. . .


Le manoir en 1939
(source : Geoportail, IGN)

Le manoir en 1946
(source : Geoportail, IGN)


Finalement


Le manoir avant guerre
(source : CPA)

Finalement les derniers châtelains à habiter les lieux sont les adultes de demain… les enfants d’aujourd’hui… Éternels insouciants, loin des préoccupations et des enjeux qui ont pu tourmenter les précédents locataires. Les bellicistes nazis, et leur volonté conquérante. Les nobles d’autrefois, inquiets de voir le monde changer. Mais qu’est ce qu’un enfant, si ce n’est un adulte en devenir ? Croyez-vous qu’un jour, les enfants qui font de la balançoire dans ce petit parc prendront le fusil ? ou actionneront ils la guillotine ?

 

C’est un parc, ou il n’y a pas de plaque pour se rappeler.

C’est un parc qui a une histoire dont il est difficile de se rappeler.

C’est un parc qui doit être mis en valeur, justement pour qu’on puisse se rappeler.

Le chateau aujourd'hui

(source : celine76aplemont.over-blog.com)


Sources


Wikipedia : 

Jean-Jacques Du Val D’Epremesnil

 

Sites et archives :

DataBNF.fr

CatalogueBNF.fr

histoirenormande.centerblog.net

celine76aplemont.over-blog.com

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Commentaires: 3
  • #1

    DESCHANDOL Alain (dimanche, 18 novembre 2018 19:14)

    Bonjour,
    Cet après midi j'ai passé une bonne partie de mon temps à visionner vos productions sur le net. Amateur de vidéos, j'ai plaisir à regarder les production sur la ville du Havre. Naturaliste passionné, je réalise des petits montages sur la faune et la flore locales. Mon fils est lui même photographe professionnel animalier et a réalisé plusieurs films sur l'estuaire de la Seine.
    ainsi j'ai quelques sujets à m'entretenir avec vous :
    1) Les Tritons: Je suis en relations avec le service des espaces verts de la ville. Je viens de réaliser
    un court-métrage sur la faune et la flore du Parc de Rouelles, dont fait partie le site d'Epremesnil. J'y suis allé plusieurs fois en 2017 et début 2018 pour filmer les Tritons du bassin : il y en avait des dizaines - uniquement l'espèce commune- Les poissons rouges ont dû être déposés il y a peu de temps. Je vais voir le problème avec les responsables du service.
    2)votre vidéo sur le bac du Hode. Je me suis jadis intéressé à cet ouvrage car c'est un site que je fréquente. J'ai trouvé des renseignements et des photos sur le sujet aux archives municipales que Laurent DUREL connaît bien...J'ai été un peu déçu du contenu du film dont la plupart du temps c'est justement Laurent DUREL filmé de dos qui apparait...
    3) je viens de terminer un sujet dont le titre est "MASSILLON, mon quartier",J'ai photographié les rues de ce quartier avec ses immeubles, ses magasins, ses jardins, etc. Les introductions sont faites par une photo ou un laïus sur le nom de la rue. Ce film doit passer en boucle à l'intérieur du supermarché "Market"rue Aristide Briand.
    Ce serait un plaisir de converser avec vous, je suis à votre disposition.
    Recevez mes meilleures salutations.


  • #2

    Clesius (dimanche, 18 novembre 2018 20:53)

    Bonsoir,

    Tout d'abord merci de m'avoir lu et d'avoir pris le temps de découvrir mes articles et vidéos que j'écris et réalise en amateur.
    Je converserai avec plaisir autour d'un café au sujet de notre patrimoine local avec vous. N'hésitez pas à me contacter par mel : max.paul.brunel@free.fr
    Concernant le bac du Hode. C'est en effet mon ami Laurent qui s'est prêté au jeu de l'interpretation d'un rôle pour ce film. Il lui aura fallu en effet incarner l'esprit du lieu, et comme cet esprit n'est ni tout à fait une personne ni tout à fait une idée, j'ai choisi de ne pas montrer son visage pour ne pas prêter une fausse apparence de réalité à quelque-chose, quelqu’un, qui ne l'est pas tout à fait. Pour ce dossier, j'ai moins voulu raconter l'histoire du lieu que d'en partager l'ambiance, mon ressenti sur place. En bref, je comprends votre déception, et j'assume mon choix scénaristique.
    Néanmoins, si vous souhaitez apprécier ses talents d'acteurs davantage, je vous recommande mon film sur "La tour Robinson". Laurent y incarne un havrais ayant connu ce monument oublié, et qui se remémore la tour.
    J'habite un peu loin d'Aristide Briand, mais il m'arrive de me ravitailler en produits asiatiques dans les environs, aussi je ferai un saut pour voir votre sujet " Massillon mon quartier". Vous avez piqué ma curiosité.
    En attendant d'échanger de vive voix sur les richesse de notre agglomération,
    je vous souhaite une agréable soirée.

    M. Brunel

  • #3

    Bienfait fabienne (jeudi, 01 février 2024 16:33)

    Bonjour
    Je travaille actuellement à la m.a.s de rouelle au manoir d'eprémesnil et j'aimerais faire une exposition sur la vie du manoir. L'origine.l'histoire, avant que le manoir ne se transforme en maison d'accueil spécialisée pour le polyhandicape.
    Mon email est. fafa76210@gmail.com
    Merci pour les renseignements que vous pourriez me fournir
    Cordialement
    Mme bienfait.